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20/11/2007

23 novembre - John Ford au Mercury

Cinéma sans Frontières et Regard Indépendant présentent :

Vendredi 23 novembre 2007

20h30

Cinéma Mercury

16, place Garibaldi, Nice

Un film de John Ford

Le sergent noir

Arizona, 1881. Le sergent Braxton Rutledge fait partie des « buffalo soldiers », troupe de soldats noirs engagés dans la guerre contre les apaches. Accusé de viol et de meurtre, il est défendu par son officier, blanc, le lieutenant Cantrell.

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Je n'ai jamais revu Sergeant Rutledge(Le sergent noir) depuis une lointaine soirée familiale et télévisuelle. Largement plus de vint ans. Je dirais si l'on me pose la question que j'ai un bon souvenir de ce film. Mais de quoi me souviens-je ? Il faudrait déjà faire la part entre le souvenir réel de cette soirée et les éléments qui se sont ajoutés au fil des années, les photographies, les articles lus, les discussions. En essayant d'être le plus honnête possible, je ne me souviens de presque rien de ce film. Si je me rappelais qu'il était question d'un soldat noir accusé de viol, je ne me souvenais même plus que le film était construit autour d'un procès. Deux images, presque des sensations : un combat des « buffalo soldiers », ces unités de cavalerie composées de soldats noirs, avec les indiens, des chevaux, de la poussière qui tourbillonne, ces fameuses chutes très dynamiques des films de Ford. Ensuite, la scène de la gare. La jeune femme qui attend sur le quai dans une ambiance quasi fantastique, la nuit, la brume, et puis la silhouette du sergent joué par Woody Strode, immense et effrayant. Mais pourtant bienveillant. C'est comme cela que l'on se crée des mythes. Et puis si je me force, me vient l'image de vieilles rombières fordiennes, Billie Burke et Mae Marsh sont de la partie. C'est tout. Ah ! Et la chanson du film, je me souviens d'un air, celui de la légende du Captain Buffalo. Ma mémoire l'a peut être déformé, je saurais ça quand je reverrais l'entendrais de nouveau.

« ...With a whoop and a holler and ring-tang-toe, Hup Two Three Four, Captain Buffalo, Captain Buffalo »

Quand Ford réalise ce film, en 1960, entre deux superproductions à grandes stars, il fait l'un de ses « petits films » qui lui tiennent à coeur et estime sans doute n'avoir rien à prouver. Il aborde un sujet sensible en cette période de la lutte pour les droits civiques d'une façon à la fois personnelle et déroutante, traduisant bien ses propres contradictions dans la représentation des noirs au sein de son oeuvre. Pourtant, avec le recul, il donne à Woody Strode, ce magnifique acteur, ce splendide être humain, un rôle qui va bien au delà de ce qui se pratiquait alors chez des cinéastes « progressistes » comme Stanley Kramer ou Martin Ritt. Tout est dans le titre qui met en avant le personnage. Il fait de son sergent noir un héros authentique. Ce n'est pas la thèse qui l'intéresse mais le portrait d'un homme. « Il m'a filmé comme John Wayne, sur fond de Monument Valley » disait Strode. Chez Ford, la dignité n'est pas dans ce qui est dit mais dans ce qui est montré, dans la façon dont sont montrés même les plus humbles. C'est Muley dans Grapes of Warth(Les raisins de la colère), c'est le chef Poney-qui-marche dans She wore a yellow ribbon (La charge héroïque), c'est Cochise dans Fort Apacheet c'est le sergent Braxton Rutledge.

Vincent Jourdan

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Dire et redire que Ford n'est pas le cinéaste conservateur qu'on croit. C'est le seul des géants de l'usine hollywoodienne, avec Walsh et Dwan, à avoir combiné le classicisme frontal de D.W. Griffith et l'instinct baroque d'Orson Welles. Ses films sont aussi radicaux qu'intemporels, aussi progressistes que passéistes. Il suffit de revoir (plutôt que de s'attarder sur l'hypocrite et fade Cheyenne Autumnle superbe Sergent noir pour s'en convaincre. Le sergent Rutledge est musclé comme un étalon et noir comme la nuit. Cela suffit-il à faire de lui un violeur ? Le film de Ford est un long procès, la défense et l'illustration de la vie d'un homme, de sa carrière, de sa morale.

Louis Sorecki

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Si Ford n’a pas cherché, semble-t-il, à faire de son personnage autre chose qu’un héros fordien, noir ou pas (et n’est-ce pas au fond la plus belle façon de déclarer l’égalité des races ?), c’est son interprète, Woody Strode, compagnon de route du cinéaste, qui lui donne une dimension supplémentaire. Son imposante stature et son apparente inexpressivité rendent d’autant plus émouvantes et justes des répliques qui, dans une autre bouche, auraient pu paraître ridicules ("dans cette guerre de Blancs, nous nous battons pour en être fiers", déclare-t-il ainsi aux soldats noirs de son régiment). Rutledge est pris dans un dilemme irrésoluble : se rendre, tout en sachant qu’être mêlé à une femme blanche est déjà pour un noir, le début de la fin ; ou fuir, et perdre tout l’honneur durement acquis après une enfance d’esclave. "On n’est pas libres encore. Peut-être un jour", affirme le sergent noir, dont le combat rejoint ainsi, cent ans plus tard, celui des Malcolm X et des Martin Luther King, pour qu’on reconnaisse enfin aux Noirs Américains le droit à la dignité d’homme.

Ophélie Wiel

 

Sergeant Rutledge(Le sergent noir)

Etats-Unis - 1960 - 111 min - 35 mm - couleur

Réalisation : John Ford

Scénario : James Warner Bellah, Willis Goldbeck

Image : Bert Glennon

Musique : Howard Jackson

Montage : Jack Murray

Décors : Frank M. Miller

Son : M.A. Merrick

Production : John Ford Production

Interprétation : Woody Strode (le sergent Rutledge), Jeffrey Hunter (le lieutenant Cantrell), Constance Towers (Mary Beecher), Billie Burke (Cordelia Fosgate), Juano Hernandez (le sergent Skidmore), Willis Bouchey (le colonel Fosgate), Carleton Young (le capitaine Shattuck), Judson Pratt (le lieutenant Mulqueen)

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